France Sushi : Pouvez-vous revenir sur l’histoire de Kiji ?

Alexandre Perret : Nous venons d’une famille assez passionnée par le Japon à l’origine. Depuis tout petits, nous savons que nous élèverons nos enfants là-bas. Mais au départ, nous n’avions pas du tout pour projet de créer Kiji. Moi, j’étais en école d’ingénieur, en finance de marché, et Florian faisait des études aussi. J’ai monté ma première boîte dans le recyclage, donc rien à voir ni avec la finance ni avec le Japon. Une fois, nous avons fait un tour du Japon en Shinkansen en partant de Tōkyō jusqu’à Kagoshima, puis nous sommes remontés jusqu’à Sapporo en passant un peu partout en suivant les sakuras. C’était censé être des vacances, mais au final, nous faisions attention à l’aspect business sans le faire exprès. Nous avons vu plein de concepts inexistants en France mais qui pourraient être répliqués, et ce qui nous a vraiment choqués, c’est le thé japonais. Même dans des vieux restaurants à Kagoshima avec 2 papis qui font à manger et où le menu coûte 3 euros avec thé offert, il était meilleur que le thé qu’on peut boire dans les grands restaurants en France… Alors en rentrant, nous avons envoyé des mails aux producteur·ices japonais·es que nous avions rencontré·es là-bas et à des intermédiaires sur place pour importer nos premiers thés pour ensuite les vendre en ligne. Ils venaient de Kyūshū car c’est là-bas que se trouve toute notre base de producteur·ices, à commencer par Kagoshima, Yame… J’ai créé un site Internet en 2 jours, hop, je les ai mis en ligne et les premières commandes sont venues tout de suite. Comme quoi il existait vraiment une demande ! Là où nous l’avons réellement compris, c’est quand les gens qui avaient commandé recommandaient la semaine d’après, puis la semaine suivante, etc. Et dès que nous avons mis le matcha en ligne, la réaction a été encore meilleure. Beaucoup de femmes entre 18 et 35 ans environ commandaient en quantité tous les mois. Nous n’avions pas idée qu’en France, il y avait un tel engouement pour le matcha comme on le voit à Londres ou à New York avec cet aspect bien-être.

Comment avez-vous développé le concept jusqu’à ouvrir votre boutique physique ?

Alexandre Perret : Dans la foulée du lancement du site, 2 mois plus tard, nous avons réussi à exposer au festival Matsuri à Vincennes. Notre stand était super bien placé, vers l’entrée. Il faisait chaud alors nous avons proposé des iced matchas et iced coffees à emporter et nous vendions aussi nos petits sachets de thé. C’était monstrueux, la queue n’a pas diminué sur les 3 jours. Au moins 1500 client·es ! Environ 10% des client·es nous demandaient où était notre boutique, mais après à peine 2 mois, ce n’était même pas dans nos projets. Ça nous a vraiment lancés. Nous avons beaucoup cherché dans le quartier japonais car nous sommes nés juste à côté et avons passé 20 ans ici. Nous ne voulions pas juste lancer une boutique de vente de thé en boîte, mais que ce soit une expérience complète comme à la Matsuri. Donc voilà l’idée d’origine : un rez-de-chaussée, salon de thé/coffee shop, un peu moderne en béton, où nous vendrions 2 ou 3 articles de thé. Puis en voyant que ce local avait un étage, nous avons pensé y mettre des tatamis. Yuki Eguchi-Mansoux de Soleil Le Vin nous a aidés à trouver le fabricant. Nous avons fait tout ça assez à l’arrache nous-mêmes – je pense qu’un architecte s’en arracherait les cheveux. Mais le but, c’était d’ouvrir assez rapidement : tout s’est fait en 3 mois. Ça fait bientôt 6 mois et nous venons déjà d’ouvrir une 2e boutique, Kiji Montorgueil rue Tiquetonne, puisque ça marche bien. Les gens aiment les bons produits entourés d’une expérience. En résumé, notre pâtissière nous fait les pâtisseries du salon de thé pour la journée et, le soir, nous devenons un bar à saké et cocktails avec un mixologue.

Une de vos particularités est que vous avez vraiment une volonté de proposer des produits bio et respectueux de l’environnement.

Alexandre Perret : Oui et pour 2 raisons. Premièrement, c’est de plus en plus important. Et deuxièmement, on le ressent dans la tasse. Un thé bio sera toujours plus doux qu’un thé non bio. La majorité des producteur·ices au Japon sont en réalité bio mais n’ont pas payé pour obtenir la certification officielle. Nous essayons cependant d’être absolument sûrs que tous nos thés sont bio, surtout les thés chinois ou indiens car ce sont des pays un peu moins sérieux sur ces aspects. On choisit donc le certifié bio européen ou français pour tout ce qui est français, chinois et indien, puis à hauteur d’environ 80% pour le thé japonais. Les 20% restants sont bio, on le sait, mais on ne peut pas le mettre sur l’étiquette. Obtenir la certification coûterait trop d’argent et de temps aux producteur·ices uniquement dans le but de nous satisfaire avec nos petites commandes de 30 kg… Ça implique aussi que tout de A à Z, même le transport, soit adapté aux exigences bio. Au final, dans le pire des cas, nous avons la certification JAS. C’est très important pour nous de ne pas proposer des thés qui ne seraient que des infusions de pesticides…

Florian Perret : Certain·es producteur·ices vont faire le choix d’utiliser quelques pesticides, surtout en Chine par exemple, car ça leur permet d’éviter de prendre de gros risques. D’une part, si les feuilles de thé sont un peu abîmées, les gens auront tendance à penser que ça signifie qu’il est de mauvaise qualité et son prix va devoir baisser. Et d’autre part, si des arbres meurent et qu’ils doivent être remplacés par des nouveaux, ces derniers mettront plusieurs années à donner du thé, ce qui risque d’impacter fortement les récoltes et revenus. Surtout que jusqu’à maintenant, le logo bio n’était pas si important que ça, mais beaucoup essaient de trouver d’autres moyens de contrôler les risques, maintenant que la certification commence à prendre de l’ampleur. 

Alexandre Perret : Ce sont des choses qui me tiennent à cœur, c’est pour cela que j’ai aussi créé une entreprise dans le recyclage. Autant continuer sur une bonne lancée et essayer de ne pas produire trop de déchets. Nous préférons ne pas préparer assez que trop et devoir jeter.

Votre concept parle donc beaucoup aux amateur·ices de thé qui cherchent de la qualité !

Alexandre Perret : Exactement. On ne s’attendait pas à une niche aussi grosse. Énormément de gens redécouvrent le thé via les nôtres et nous disent avoir l’impression de ne jamais avoir bu un bon thé de leur vie. Et c’est pareil pour le café de spécialité. Je suis fan de café, c’est d’ailleurs pour ça que nous vendons aussi un très bon café. Quand tu bois un café de brasserie toute ta vie et que, d’un coup, tu passes à un café de spécialité, qui va avoir des notes beaucoup plus complexes et délicates, ça donne l’impression de n’avoir jamais bu un vrai café. Certaines personnes passent de Lipton à nous tout de suite et sont super contentes, d’autres étaient habituées aux standards français comme le Palais des Thés ou les entreprises qui ont lancé le matcha en France, et quand ces gens goûtent nos thés, ils reviennent. Déjà grâce à notre qualité assez exceptionnelle, mais aussi parce que nous ne faisons pas des marges extraordinaires sur le thé. Nous avons d’autres choses en plus comme des pâtisseries, ce n’est pas comme si nous étions restés uniquement sur un site de vente de thé en ligne. Nous pouvons nous permettre de faire moins de marges et de proposer de meilleurs produits. Nous entretenons aussi une relation assez privilégiée avec les producteur·ices. En plus, nous commençons à voir beaucoup de client·es japonais·es. Ça nous tenait à cœur de faire une boutique japonaise qui plaise aux personnes concernées. Ça nous fait ultra plaisir de les voir apprécier ce que nous leur servons.

Quel genre de lien avez-vous construit avec les producteur·ices ?

Alexandre Perret : Nous sommes en contact direct sur Instagram avec certain·es. Ce sont souvent les enfants ou les petits-enfants des producteur·ices qui gèrent leur compte, alors nous pouvons communiquer en anglais et assez rapidement. Par exemple, la récolte de 2024 vient du fils d’un producteur qu’on a rencontré et qui nous envoie tout via le port de Fukuoka. C’est lui qui emballe et qui essaie de faire la communication à l’étranger. Ils·elles sont souvent très content·es de voir leurs produits vendus à Paris. À part ça, un intermédiaire est sur place pour la majorité des producteur·ices, il les regroupe et il nous envoie tout d’un coup. Nous ne travaillons qu’avec des gens à Kyūshū pour l’instant, mais leurs thés sont souvent plus doux, plus floraux, parce qu’ils ont pris plus de soleil. C’est un peu comme le vin en France, celui du sud est souvent plus fruité, plus doux, plus sucré que celui du nord. Les thés japonais du sud se reconnaissent tout de suite. Les matchas sont très floraux et fruités avec presque aucune amertume. Pareil pour les senchas qui peuvent être assez puissants en bouche. Les versions plus douces plaisent plus aux Français·es. Les gens ont l’impression que les matchas amers sont de mauvaise qualité alors qu’ils sont juste parfois complexes. D’ailleurs, ce sont souvent ceux qui gagnent les compétitions au Japon, mais ils sont trop complexes pour nous. Alors le tip Kiji : allez chercher votre matcha à Kagoshima ! On nous dit souvent avoir l’impression de découvrir que le matcha, ce n’est pas juste de l’herbe amère. (rires) Et c’est sympa de boire un matcha doux le matin.

Comment vous êtes-vous formés ?

Alexandre Perret : Surtout en autodidacte en pratiquant sans arrêt. Je pense que Flo et moi avons fait plus de matcha que certaines dames qui font des cérémonies du thé au Japon dans toute leur carrière. (rires) Elles en font 2 ou 3 par jour maximum, mais quand Flo est seul le weekend, il peut faire 120 matchas dans une journée. Nous avons même appris le latte art.

Florian Perret : Nous essayons de répliquer la préparation d’un thé de cérémonie, mais il faut forcément ajuster pour ne pas faire attendre une heure les client·es. Nous avons dû apprendre à le fouetter correctement, mais aussi à le fouetter un petit peu plus rapidement que pendant une cérémonie.

Alexandre Perret : Vous seriez venue le premier jour à Kiji, le matcha n’aurait pas eu le même goût et vous n’auriez jamais eu un cœur sur votre latte ! (rires) Après, nous avions déjà des bases. Nous savions que la plus grosse erreur que font les Français·es en préparant du thé, c’est de l’infuser à l’eau bouillante. Avec un thé noir chinois ou quelque chose comme ça, passe encore, mais avec un thé vert, il n’en reste que l’amertume et aucune note florale, fruitée, etc. Nous sommes assez précis là-dessus. Là, par exemple, Flo est en train de calibrer le café. On va en faire une trentaine avant de trouver le bon. Pareil sur la pâtisserie ; notre pâtissière est très carrée et elle veut que tout soit préparé au gramme près. Évidemment, nous avons fait beaucoup d’erreurs au départ. Ce qui est bien avec les Français·es, c’est qu’ils·elles ne font des retours que quand c’est négatif. (rires) Donc on peut recalibrer le jour même. Dès le 3e jour d’ouverture, une review disait qu’on ne sentait que le lait dans le matcha latte, alors nous sommes passés de 2,8 à 4,2g de matcha. Chaque préparation est faite au gramme près, comme ça, tout le monde a le même thé. Ça prend un peu plus de temps, mais au moins les gens aiment. Nous avons choisi 4,2g parce que c’est ce qui nous plaît, pas parce qu’un livre donnerait cette instruction ou autre. En revanche, avec la récolte de 2024 qui vient d’arriver, le matcha est un peu plus fort, donc nous allons en mettre 4g. Nous nous trompons et apprenons de nos erreurs. Il nous reste plein de choses à apprendre sur le saké, le thé, etc. Ce sont des mondes ultra vastes !

En parlant de saké, qu’est-ce qui vous a donné envie d’en servir ?

Alexandre Perret : Puisque nous aimons beaucoup ça, nous avons décidé de profiter du créneau du soir, pendant lequel nous aurions fermé si nous restions juste un coffee shop, pour faire bar à saké dans notre jolie pièce à tatamis. Un ami mixologue, Maxime, avait toujours rêvé d’ouvrir son bar alors nous avons eu envie de tester l’expérience ensemble. Et ça marche ! Maxime s’amuse avec le saké qu’il a un peu découvert via nous. On peut en faire de super cocktails. C’est un alcool que les Français·es ne connaissent pas encore, donc nous essayons de le montrer sous une belle forme. Ça peut dérouter d’aller tout de suite sur un saké un peu fort, donc via un cocktail sympa, ça fonctionne bien. Nous explorons jour après jour des façons de faire de bons cocktails, de bons mariages. Nous faisons plein de tests et, de toute façon, on voit tout de suite au visage du·de la client·e s’il·elle aime ou pas… (rires)

Il y a depuis quelque temps un gros boom des alcools japonais. Est-ce que ça vous donne envie d’en explorer d’autres ?

Alexandre Perret : Nous le faisons déjà ! Nous utilisons beaucoup de shōchū, spécifiquement le Daiyame dans la majorité de nos cocktails, du gin ou encore du whisky japonais. Nous essayons de mettre du bon whisky dans les highballs pour faire ça bien, à la française : avec un peu de sirop de vanille, de citron… Pas juste du whisky et de l’eau pétillante comme on peut en boire au Japon. Nous voulons montrer aux Français·es que c’est cool, que c’est bon, qu’on peut s’amuser avec et découvrir de nouvelles saveurs. Beaucoup de gens nous achètent directement des bouteilles, ou vont à Nicolas prendre une bouteille de saké pour un anniversaire pour faire goûter à leurs ami·es. Ça nous fait super plaisir. La majorité de nos ami·es sont même passé·es à 100% au saké en soirée à la place du vin. Et c’est toujours chouette de ramener ça en dîner de famille, pour faire goûter à Mamie qui a bu du vin toute sa vie. (rires)

Pour revenir sur la boutique en elle-même, vous servez les boissons dans de très belles céramiques. D’où viennent-elles ?

Alexandre Perret : Ce sont des céramistes françaises qui nous les ont faites. Annick Monte, une parisienne qui a étudié au Japon, nous fait tous les chawans sur mesure. Chaque pièce est unique, elle aime bien changer les formes, les couleurs, les émaux… Et toute la vaisselle vient de Julie Sauvage, une jeune Lilloise qu’on a trouvée via Instagram et dont nous adorons le travail. Nous avons réfléchi avec elle sur les formes et les tailles qui conviendraient à nos différentes boissons et ça a donné ces assiettes vertes avec des émaux gris, ces petites tasses à thé… C’est important pour nous de servir dans de la belle vaisselle, d’autant plus qu’au Japon, le contenant est aussi important que le contenu. Des études ont même été menées aux États-Unis sur le café et il semblerait que le goût change selon la forme du bol et la finesse de l’endroit où on pose les lèvres. Je pense que ça a été compris il y a très longtemps au Japon et que c’est pour cette raison que leurs vaisselles sont très fines, très épurées et différentes selon ce qu’on boit. Même lors d’une cérémonie du thé, on regarde toujours la tasse, pour savoir qui l’a faite. Nous avons voulu transposer cet élément crucial à Kiji. C’était un choix un peu logique pour nous, mais ça a en réalité eu un impact énorme sur notre succès, car beaucoup de gens prennent en photo les céramiques pour les poster sur les réseaux juste parce qu’elles sont jolies ! Vous pouvez même les acheter. Finalement, ce que les gens vont prendre en photo et dont ils vont se rappeler, ce sont nos belles céramiques, nos tatamis et nos jolies lampes. Chaque détail est important et ça participe de l’expérience. Le sur-mesure n’était même pas beaucoup plus cher qu’une bonne marque de vaisselle, et on a pu choisir les couleurs, les formes et tous les contenants au millilitre près. Nous sommes ravis de travailler avec ces deux personnes.

Que proposez-vous d’autre que les pâtisseries en cuisine ?

Alexandre Perret : Nous n’avons pas grand chose en salé, l’idée étant de le faire à la japonaise : presque aucune marge sur la nourriture, qui sert plutôt à accompagner l’alcool. Les 10 gyōzas sont à 4 euros, les 8 karaages à 3,50 euros, et la marge se fait plus sur l’alcool. Ça nous avait marqués au Japon. Un soir, à Ōsaka, nous sommes entrés dans un restaurant qui servait 25 gyōzas pour 2 euros. Le saké était un peu plus cher, mais les gyōzas étaient bons. C’est une super idée, et puis nous n’avons pas la licence 3 ou 4 donc nous sommes obligés de servir à manger avec l’alcool. Alors quitte à être obligé·e de manger, autant ne pas payer trop cher. Au pire, on partage l’assiette avec ses ami·es. Comme ça, ça nous permet de contourner tous les problèmes et ça marche plutôt bien. Ça ne nécessite pas non plus d’avoir un·e chef·fe sur place, ce qui aurait été un peu compliqué. Nous pourrions aussi devenir un restaurant à part entière, mais bon, l’ambiance se prête plutôt à boire avec ses ami·es, rigoler et manger un petit truc.

Pensez-vous rester sur le même concept dans vos prochaines boutiques ?

Alexandre Perret : Pas du tout. Je pense que nous n’ouvrirons que des boutiques différentes. Nous voulons essayer de ne faire que de la vente à emporter dans la boutique de rue Tiquetonne qui est toute petite. La carte restera à peu près la même, dans le style coffee shop avec des cookies, peut-être des mochis ou du cheesecake japonais, mais pas plus. Il y aura des petits sachets de matcha, mais pas grand chose. C’est une rue très passante, presque piétonne et il n’y a vraiment aucun coffee shop dans le quartier, donc nous allons tester. Nous avons déjà l’expérience d’une grosse boutique qui marche bien, et une petite boutique est aussi plus facile à ouvrir car il y a moins de travaux, c’est moins cher et une seule personne suffit derrière le comptoir. Alors qu’ici, il faut souvent être plusieurs. Nous essaierons d’autres choses, peut-être dans la restauration. Nous avons une idée par jour alors il faut se canaliser ! (rires)

Florian Perret : Ici, nous avons un peu tout mélangé et c’est beaucoup de travail. C’est dur de tout très bien faire. Mais une fois qu’une chose marche, ça permet de propulser d’autres projets.

Quel genre d’idées avez-vous pour la suite ?

Alexandre Perret : Pendant notre voyage, nous nous sommes rendu compte qu’il y avait énormément de concepts au Japon qui n’existent pas en France mais qui pourraient être réplicables ultra facilement et qui marcheraient super bien. Typiquement, quelque chose que Flo et moi feront peut-être : un ramen à 5 ou 6 euros à Paris. Ça n’existe pas parce qu’en France, les gens s’assoient pendant 2 ou 3 heures alors qu’au Japon, tu as fini ton ramen, tu pars et ça tourne. Mais je pense que si demain nous ouvrons un restaurant rue Sainte-Anne où nous prévenons que le concept c’est « vous avez fini, vous partez, mais c’est 5 euros », alors les gens viendront et il y aura la queue tous les midi. En fait, avec Flo, notre vision, c’est d’aller vite. Ce qui est bien quand on va vite, c’est que même si on échoue sur un projet, on peut directement passer à la suite sans problème. Et puis au moins on sait rapidement si un concept marche ou pas, donc on n’aura pas perdu trop d’années de notre vie dessus. Mieux vaut se planter vite qu’au bout de 7 ans, quoi. Le but, c’est de faire vivre des expériences aux gens. Nous ne voulons pas juste vendre un produit, mais l’expérience globale. Ici, nous le faisons avec les tatamis et les céramiques, le bon matcha, le fait de connaître nos producteur·ices et de pouvoir raconter une histoire… Pour nous, il faut faire du bon, pas trop cher et avec une belle expérience. Ça fait que les gens reviennent. Nous pensons aussi à torréfier notre café nous-mêmes, parce que nous avons du mal à trouver du bon café à Paris.

Florian Perret : Ça nous plaît de changer de goût régulièrement, mais ça nous oblige aussi à changer de torréfacteur·ice régulièrement, ce qui fait qu’il est dur de conserver le même standard de qualité partout. Quand nous retournons en voir un·e pour lui acheter le même café qu’il y a 2 mois, il·elle n’a pas toujours reçu le même grain ou ne travaille plus avec les mêmes producteur·ices. Alors ça complexifie la vie. Faire notre propre café nous permettrait de décider exactement des goûts et d’être un peu originaux.

Alexandre Perret : D’ailleurs, café et thé sont très liés en boutique. Nous vendons environ 85% de thé, mais le café se vend aussi, surtout auprès des personnes qui n’aiment pas tellement le matcha. Je pense que si nous vendions des petits sachets de torréfaction Kiji, ça marcherait très bien. Nous aimerions aussi nous développer hors de Paris, dans le sud de la France par exemple. Ce sont des endroits où les modes arrivent un peu en retard et aujourd’hui, ouvrir dans ces villes un bel endroit où on vend de beaux produits japonais ou un bon restaurant, ça marcherait du feu de Dieu. Avec une boutique de qualité, sobre, élégante… Nous pourrions même faire ça au Japon. Ouvrir un établissement français à Tōkyō ou Kyōto est déjà un peu trop tard, alors qu’à Fukuoka ou Kagoshima, ce serait super. Alors pourquoi pas ? Il faut jouer le jeu, expérimenter, voir ce que les gens veulent. Si ça marche, tant mieux, et sinon, on passe à autre chose. Le business n’est pas facile, je ne dis pas ça, il y a des problèmes tous les jours. Mais c’est le début d’une belle aventure, j’espère. En tout cas, ça se passe bien entre frères, on est bien complémentaires !

Voulez-vous transmettre quelque chose en particulier aux personnes qui vous liront ?

Alexandre Perret : N’infusez pas votre thé vert à plus de 70 degrés, s’il vous plaît ! (rires) Venez goûter nos thés et n’hésitez pas à vous mettre au comptoir pour taper la discute, on adore parler avec nos client·es !

 

Organisation : Yuki Eguchi Mansoux de Soleil Le Vin SAS.

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