
Ce n’est pas la première fois que la Normandie et Setouchi se côtoient : il y a 16 ans, le Mont Saint-Michel et l’île de Miyajima se sont jumelés et, depuis, les deux travaillent à renforcer leurs échanges culturels et économiques. Cet événement marque ainsi le lancement d’un volet gastronomique à leurs relations, soutenu par les deux associations Carrefour de l’Art de Vivre et Disciples Escoffier Normandie Grand Ouest. D’autres initiatives sont également prévues afin de renforcer ces liens culinaires : le France Festival qui se tiendra les 30 et 31 août dans le port d’Onomichi, un dîner de gala au Japon mettant en valeur les produits de Normandie et de Setouchi, des échanges culturels entre des écoles hôtelières, des concours culinaires, la formation de jeunes chef·fes, la création d’un livre de recettes franco-japonais et des études visant à promouvoir les échanges et l’import-export des produits des deux régions. Les autres régions japonaises ne seront pas en reste dans le cadre de ce projet ; Setouchi sera le point de départ d’une vaste collaboration gastronomique entre la Normandie et le Japon.
Lors de cet événement étaient dispensées, auprès des aux professionnel·les de la restauration, des masterclass sur les produits japonais, notamment sur le miso par Raphaël Haumont ou encore sur les sakés de Saga. Le restaurant Jinchan animait au bar un atelier autour des sakés de Nagano. En parallèle, plus de 40 sakés, liqueurs et spiritueux japonais étaient proposés en dégustation libre, dont une grande partie était fournie par l’importateur WeWantSake, et le reste avait été apporté depuis le Japon par 2 producteurs venus spécialement pour l’occasion, Miyake Honten et Komatsu Shuzô. Le chef Nicolas Leseur, membre des Disciples Escoffier et moteur de ce projet franco-japonais, proposait avec ses collègues 6 bouchées destinées à être dégustées pendant les ateliers pour accompagner les différents sakés.
Au menu :
- Les huîtres IGP Normandie–Côte Ouest, kiwi, concombre de Bricquebec, agnolotti au jambon de Lessay. En pairing avec le saké Nozomi de Komatsu Shuzô.
- Les harengs fumés de Fécamp, proposés par SEPOA Delgove, panade de Tacaud de Cherbourg, pickles de pomme à cidre, betterave du Val de Saire. En pairing avec le saké Shinriki de Miyake Honten.
- La teurgoule de Janville à Cesny-aux-Vignes, pépinière des Landes, safran normand, crêpe noisette. Un dessert normand d’antan, doux et réconfortant, à déguster avec le saké Calm de la maison Kiyama.
- La fromagerie Réo de Lessay, café, fenouil, rhubarbe. Différents camemberts agrémentés avec des confitures et des purées ramenées de Kôbe et d’Okayama par Nicolas Leseur. En accord avec le Kagura Clear de la maison Matsui.
- Bulot, pomme, shiromiso, gelée de cidre, vinaigre de cidre.
- Andouille, akamiso, chocolat noir.
Sakés de Hyôgo avec Kenbishi
À Hyôgo, du sol au climat, tout est idéal pour la culture du riz à saké. C’est donc là-bas qu’est produite la majorité du riz à saké du Japon, dont le Yamada-Nishiki, la reine des variétés de riz. La région est aussi proche des grands lieux historiques de consommation que sont Kyôto et Ôsaka. La maison Kenbishi de Hyôgo a été fondée en 1505, faisant d’elle une des plus anciennes brasseries japonaises, à l’époque particulièrement aimée des gens d’Edo et notamment du shôgun.
Kenbishi présentait lors de cet événement des sakés vieillis et sakés d’assemblage, qui ont beaucoup d’umami et une grande présence, dans un style classique traditionnel.
Nous avons commencé par le Kuromatsu Kenbishi, un saké doux vieilli entre 1 et 4 ans, excellent avec les fruits de mer, le poisson cru ou cuit, le jambon cru, les desserts et les fromages.
Nous avons continué avec le Mizuho vieilli entre 2 et 8 ans, aux notes de champignons et de céréales. Kenbishi recommande de le servir en accompagnement de mets tels que : les ingrédients nobles comme le homard ; les coquilles Saint-Jacques ; les volailles savoureuses comme la pintade et le lièvre ; les poissons à chair rouge tels que le thon ; toutes sortes de champignons ; les fromages comme les bries truffés, le Brillat-Savarin truffé ou le Pont-l’Évêque fermier. Il se consomme aussi bien chaud qu’à température ambiante.
Enfin, nous avions le Zuishou, très complexe au nez avec des notes de cacao, miel, brioche, noix, noisette et cumin, et une riche saveur d’umami longue et persistante en bouche. Il s’accorde très bien avec le foie gras, le ris de veau, la mimolette vieille, le Parmigiano Reggiano granuleux, ou encore la ganache au chocolat noir.
Miyake Honten
La maison Miyake a été fondée en 1856 à Kure dans le département de Hiroshima sous le nom de Kawachiya, d’abord spécialisée dans la fabrication de mirin, de shôchû et de shirozake, avant de se lancer dans la production de saké en 1902. À la fin des années 1920, elle a été désignée comme fournisseur de l’armée et a ainsi acquis une grande notoriété. Elle est encore aujourd’hui une brasserie importante au Japon, ayant par exemple participé à la résurrection de la variété de riz Shinriki, très difficile à cultiver et dont l’usage s’était arrêté, ce qui a valu à Miyake Honten une médaille d’or au concours Slow Food Japan en 2012 pour son Shinriki Kimoto Junmai Muroka Genshu. Son fameux saké Sempuku Junmai Daiginjô Kura a remporté, lors de l’édition 2020 de Kura Master, le Prix du Jury, puis la médaille d’or de la catégorie Junmai Daiginjô en 2025.
Kiyotsugu Miyake, président de la société, présentait pendant cet événement 3 bouteilles, toutes distribuées en France. Tout d’abord, le Junmai Kimoto Sempuku Shinriki, un saké assez puissant à la bouche dense et aux saveurs corsées à la fois riches, douces, acides et amères. Il s’accorde ainsi très bien avec viandes et fromages.
Ensuite, le gin Setouchi Lemon, fabriqué avec du citron de Hiroshima, la plus grande région productrice de citrons au Japon, et du thé vert qui le rendent doux, frais et intense. Il est particulièrement apprécié.
Et enfin, le Setouchi Lemon Ginger, un assemblage de saké, de citron et de gingembre. Cette liqueur faible en alcool (6%) et sucrée est à servir très fraîche, avec de la glace pilée, allongée d’eau pétillante ou de tonic, en apéritif ou en dessert.
Komatsu Shuzô
Cette petite brasserie de Saga a été fondée il y a 170 ans et compte aujourd’hui 9 personnes, dont seulement 5 sont chargées de la production du saké. Elle a 3 particularités : le riz servant à son saké est cultivé dans un rayon de 5 kilomètres, tout est fait à la main sans machine, et on y utilise des outils en bois et non en inox comme c’est la norme aujourd’hui. Son saké se distingue aussi de ce qui est aujourd’hui populaire au Japon : quand ce sont des sakés principalement sucrés et frais qui plaisent, Komatsu Shuzô produit des sakés vieillis aux arômes discrets.
Le président et fabricant Daisuke Komatsu présentait 3 bouteilles en plus du Nozomi servi en accompagnement des huîtres normandes. Il y avait tout d’abord le Manrei Tokubetsu Junmai Chô Karakuchi, saké phare de la maison et particulièrement approprié pour accompagner les plats gras.
Nous avons aussi dégusté le Manrei Tokubetsu Junmai Yaoyorozu, fabriqué à la méthode kimoto et vieilli 5 ans. Très sec, il possède une légère acidité ainsi qu’une profondeur en bouche qui le rend très bon chaud également.
Et enfin, le hon mirin Nomirinko, fabriqué à partir de riz gluant, de kôji et de shôchû, non filtré, non pasteurisé et vieilli 4 ans à température ambiante. C’est la seule bouteille présentée sur le stand de Komatsu Shuzô pendant l’événement à être distribuée en France. Cette liqueur très expressive et veloutée rappelle des saveurs de caramel, d’abricot ou encore de sauce soja sucrée. Dans le hon mirin, le sucre provient naturellement du riz sous l’action du kôji. Il se boit après le repas, seul ou mélangé à du lait, ou encore versé sur de la glace.