L’idée de ce projet, on la doit à M. Shinichi Miyagawa, maître de thé et dernier représentant en date de la Maison Kôsai Miyagawa – maison d’artisans céramistes de style makuzu-yaki, établie depuis 330 ans à Kyoto.
Venu présenter en 2016 la cérémonie du thé à la Maison de la culture du Japon à Paris, M. Miyagawa s’était dit qu’il faudrait aller plus loin, et dépasser le seul cadre de la préparation du thé, pour présenter la tradition culinaire qui l’accompagne – le cha-kaiseki. Ce repas léger et particulièrement codifié ”n’a pas pour but de proposer de la bonne cuisine”, nous dit-il, ”mais de donner à voir la sobriété de l’hôte”. Et son hospitalité, évidemment.
Traditionnellement, l’organisateur du cha-ji (c’est ainsi que l’on nomme la cérémonie du thé au complet) se charge de choisir les ustensiles, de cuisiner le repas, de faire le service, et enfin de préparer le thé. L’événement du jour dérogeait quelque peu à la règle, puisque différentes parties prenantes s’étaient réparties les taches.
Ainsi, les céramiques avaient été sélectionnées avec soin par la famille Miyagawa et d’autres maisons japonaises – certaines pièces ayant été créées spécifiquement pour l’occasion. Les convives ont ainsi pu découvrir des créations flamboyantes, aux riches motifs – formes géométriques ou scènes naturelles, comme une splendide vague inspirée de la célèbre estampe de Hokusai.
Délicatement déposée au creux des céramiques, on pouvait trouver la cuisine de M. Yuichiro Akiyoshi. Son nom vous est peut-être inconnu, mais le chef a un beau palmarès à son actif puisqu’il a officié pendant plus de dix ans au restaurant gastronomique Hyotei, à Kyoto (3 étoiles Michelin) avant de travailler pour M. l’ambassadeur du Japon auprès de l’OCDE de 2013 à 2016.
Le chef a prévu d’ouvrir son propre restaurant de cha-kaiseki à Paris – encore une première ! Nous vous en reparlerons, évidemment.
La présentation et le cérémonial étaient quant à eux assurés par Mme Fumi Kojima, maître de thé de la tradition Omotesenke, ainsi que par une cohorte d’officiants japonais et français.
Les convives du jour étaient invités à suivre les instructions du staff afin de bien suivre le cérémonial – tradition du thé oblige. Ainsi, il convient par exemple d’enlever et d’empiler les couvercles des plats d’une certaine manière. Il faut toujours laisser l’équivalent d’une bouchée de riz dans son bol afin d’indiquer que le repas n’est pas terminé. Et une fois que le dernier plat est consommé, il faut faire tomber bruyamment ses baguettes au fond du plateau de service, afin d’appeler l’hôte qui attend patiemment dans une pièce adjacente.
Le cha-kaiseki a bien évidemment un lien direct avec la cuisine kaiseki (la ”haute gastronomie” nippone) dont nous vous avons parlé dans France Sushi.
On trouvait servis en plus du riz et des soupes (dont une fabuleuse à base de miso blanc, perles de gluten, épinards et moutarde japonaise) des plats préparés grâce à différents modes de cuisson et de préparation : mukozuke (sashimi de daurade royale marinée au konbu, racine de wasabi, algues nori et radis, sauce citronnée ponzu), yakimono (saumon grillé, sauce Yuan au yuzu) et autres konomono (radis en saumure au sansho), pour n’en citer que quelques-uns.
Le repas s’est terminé, comme il se doit, par une dégustation de thé matcha fouetté, accompagné de douceurs sucrées des maison Toraya (Paris) et Kagizen Yoshifusa (Kyoto).
En conclusion, après avoir parlé plus longuement de l’artisanat de sa maison, M. Miyagawa a exprimé son souhait de donner au sein de la MCJP une conférence autour du cha-kaiseki et des céramiques qui l’accompagnent, idéalement début 2021. On y sera !