On connaît tous la préfecture de Nagano pour son image de carte-postale qui a fait le tour des réseaux sociaux et des guides de voyage : des macques au museau rouge qui profitent d’un bon onsen naturel, au beau milieu de la montagne enneigée. Mais il y a bien plus que ce cliché qui fait rêver : une fois la neige fondue, c’est toute une région de nature et de paysages sublimes qui se révèle. Avec, à la clé, quatre ingrédients phare de la gastronomie japonaise produits et cultivés sur place. Passage en revue de quatre joyaux qui font voyager rien qu’à en évoquer goût et texture.
Du wasabi à perte de vue
La nature des champs et des montagnes de Nagano a donné au wasabi son intensité et sa couleur verte vive. C’est dans cette préfecture que l’on retrouve d’ailleurs la plus grande ferme de wasabi au monde, la Daio Wasabi, sise à Azumino, non loin de la bourgade de Matsumoto. Sur les quinze hectares de cette ferme en activité depuis plus d’un siècle, on peut ainsi admirer les vastes champs de cette racine au goût puissant mais subtil, parfois comparé aux fleurs de moutarde françaises. Au beau milieu des maisons de chaume de la région, on peut admirer les nombreux champs qui bordent les rivières des alentours de Nagano, puisque ces racines puisent leur force et leur goût dans ces cours d’eau naturels à l’eau directement sourcée dans les montagnes avoisinantes. Côté transformation, on connaît tous le wasabi utilisé dans les sushi ou pour déguster sashimi et même bœuf gras, mais à Nagano, on aime le décliner dans des recettes encore plus inventives qui tirent parti de toute la subtilité de la production locale. Si la glace au wasabi n’est pas à mettre entre toutes les bouches —la puissance du wasabi peut y être particulièrement vivace, créant un goût unique—, on pourra tenter en toute sécurité les wasabi-soba toutes en nuances ou des croquettes au curry vert au… wasabi ! Côté boisson, la région n’est pas en reste, explorant les possibilités gustatives de cet or vert avec des déclinaisons en soda ou en bière, parant ces boissons sucrées ou alcoolisées d’une complexité nouvelle et rafraichissante.
Le Kanten, un gélifiant bon pour la santé
Soyons francs, avant de mettre un pied dans la beauté époustouflantes des montagnes dominant la préfecture de Nagano, on n’avait jamais entendu parler du « Kanten », équivalent lointain du « Agar-Agar ». Mais depuis notre retour en Europe, c’est presque devenu une obsession tant ce gélifiant 100% nippon fait des miracles pour la santé, là où nos solutions occidentales sont le plus souvent nocives pour la santé. Le kanten est en fait un gélifiant totalement naturel créé à partir d’une algue rouge, la « tengusa », que l’on trouve non loin de Nagano. Il faut ainsi faire cuire cette algue afin d’en durcir l’extrait, puis la congeler avant de la sécher. La force du kanten, c’est sa richesse exceptionnelle en fibre, couplée à une faible richesse calorique, ce qui en fait un partenaire santé et minceur sans nul autre équivalent. Au Japon, cette gélatine vegan qui se distingue de loin de la pectine ou, pire encore, des gélatines animales se retrouve dans de nombreux desserts traditionnels, qui sont eux aussi des spécialités de la préfecture de Nagano : yokan, pâtes de fruits « anko », mochi, divers gâteaux. L’un de ses intérêts gustatifs est… d’en être dépourvu ! En effet, sans goût ni texture, le kanten permet de cuisiner de manière très saine sans altérer le goût ou l’aspect des préparations. On peut l’utiliser en gelée (la meilleure façon, utilisée au Japon) mais également en poudre, comme c’est la plupart du temps le cas à l’export. L’essayer, c’est l’adopter !
Les douces effluves du saké de Nagano
On ne compte plus les brasseries de saké à Nagano, tant la région regorge d’endroits uniques et traditionnels en la matière. Enfin, si, puisque ce ne sont pas moins de soixante-dix-huit brasseries qui sont encore actives en 2023, grâce aux conditions naturelles et météorologiques exceptionnelles des montagnes de Nagano. L’Ouest du Japon est d’ailleurs mondialement reconnu pour ses saké, avec en tête de liste les préfectures de Niigata et de Nagano. Cela fait trois siècles déjà que ces deux préfectures voisines dominent le marché du saké, avec des créations qui tutoient les sommets de subtilité et de richesse gustative. Il faut dire que l’eau y est cristalline, l’air d’une pureté rare, que le soleil brille souvent en dehors des tempêtes de neige, et que les fluctuations de températures aident à créer des nectars au goût unique en leur genre. Selon les dix régions de la préfecture de Nagano, le goût et le savoir-faire va légèrement varier, laissant ainsi toute son identité aux créations de chaque brasseurs. Le climat d’Uedo n’est pas le même que celui de Suwa ou de Matsumoto, offrant ainsi une vaste palette de goûts qui séduira le plus connaisseurs des esthètes du saké. Nagano bénéficie également depuis deux ans de l’appellation d’origine contrôlée « GI » qui certifie l’origine géographique précise de ses bouteilles, permettant un traçage optimal du sourcing ainsi qu’une commercialisation très précise pour les amateurs.
Un Miso pour chaque moment de la vie
L’autre richesse de la préfecture de Nagano est le le Shinshu Miso, un miso produit à partir du riz, et qui est doté d’une couleur à couper le souffle, entre doré et brun très clair. Afin d’obtenir ce magnifique miso, on y mélange avec une recette secrète malt de riz, soja et sel. Il faut dire que la préfecture regorge de ces ingrédients naturels, riz et soja en particulier. On retrouve également à Nagano nombre de fabriques de sauce de soja, connue pour sa couleur profonde, sa douceur toute en retenue et son arôme rafraichissant. Mais revenons au miso, puisque la préfecture est le premier producteur de miso du Japon : le miso étant à la base de toute la gastronomie japonaise, on le retrouve partout, notamment dans la cuisine des légumes. Ce miso fermenté grâce au koji se marie particulièrement bien avec les tsukemono, connus pour leur richesse en fibre et leur faible valeur calorique, à déguster comme des snacks équilibrés et forts en goût. La fermentation du Shinshu Miso bénéficie une fois encore du climat unique de la région de Nagano, qui a permis au fil des années d’affiner la technique du koji et de l’exploitation optimale des micro-organismes de fermentation. La grande croyance populaire japonaise affirme depuis bien des siècles que le « miso permet d’éviter d’aller chez le médecin » : au vu de la longévité des habitants de Nagano et ses alentours, on aurait tendance à y croire également à notre tour !