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En ce début mai saturé de lumière, de soleil et de jours fériés, la Fondation Cartier pour l’art contemporain nous offre un grand bol d’air en plein Paris. Dans l’univers architectural du Japonais Junya Ishigami, tout est paysage. Ses constructions subtiles, extrêmement pensées, désentravées, abolissent les imites, se jouent des frontières spatiales entre l’intérieur et l’extérieur, entre le végétal et les matériaux de construction. Lignes pures, perspectives, courbes sans fin, légèreté. Murs d’une école maternelle en forme de nuages où jouent et se reposent les écoliers japonais. Rochers mégalithiques supportant le gigantesque toit de huit villas chinoises épousant les rives d’un torrent, en pleine montagne. Gigantesque chapelle conçue comme un pli en béton surgi d’une faille rocheuse. Immensité de l’Institut technologique de Kanagawa, dépourvu de cloisons intérieures, planté de fines colonnes blanches aléatoires, comme une forêt.

« Les fantômes sont constitués de vide. Ils retiennent le paysage, errent doucement dans les airs. »

Et cette forêt de la préfecture de Tochigi, justement, dont les arbres condamnés par un projet immobilier ont été déplacés et replantés par Junya Ishigami pour recréer, plus loin, sur les vestiges de l’ancien système d’irrigation d’une rizière, une accumulation de mini paysages, quasi surnaturels, où chaque arbre se reflète dans une multitude de petits étangs de forme oblongue, parsemant le tapis de mousse. Entretenir la mémoire, ne heurter ni l’œil ni la nature, et encore moins la détruire. Fasciné par les enfants hauts comme trois pommes pour qui les pieds d’une table ou les pattes d’un chien sont déjà des éléments d’architecture, il aime « penser à l’échelle humaine ». Telle cette résidence pour personnes âgées atteintes de démence, constituée d’une quarantaine de maisons traditionnelles vouées à la démolition. Chaque charpente a été déplacée et réinstallée par l’architecte pour que les résidents privés de mémoire puissent, sous ces vieilles poutres patinées par le temps, se repérer et se sentir chez eux. Et glisser « paisiblement vers un nouveau monde ». Ce monde flottant, transparent, léger, naturel et poétique auquel nous convie, ici-bas, Junya Ishigami.

Junya Ishigami, Freeing architecture. Fondation Cartier pour l’art contemporain,
261 boulevard Raspail, 75014 Paris.

© Sophie Gallé Soas
© Sophie Gallé Soas
© Sophie Gallé Soas
© Sophie Gallé Soas
© Sophie Gallé Soas
© Sophie Gallé Soas
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